jeudi 23 septembre 2010

Mort d'un jardinier - Lucien Suel

Mort d'un jardinier
Page 170, je referme le livre et le pose sur mon lit, voilà, l’histoire est finie… J’ai des frissons.
J’abandonnais juste une lecture en son milieu, car le texte s’éloignait inexorablement de moi et la rencontre n’avait pas eu lieu, lorsque ce livre est tombé de la boîte aux lettres : « Mort d’un jardinier » de Lucien Suel. Couverture sobre et jolie, je ne connais pas Suel. Le titre me renvoie à « Dialogue avec mon jardinier » d’Henri Cueco ou encore « L’année du jardinier » de Karel Capek. J’ai gardé d’agréables traces de ces lectures. Pourquoi pas ? Me laisser tenter, toujours…
Avec une écriture simple et fluide, Lucien Suel me prend la main et m’entraîne dans son jardin. Fête des sens, on croque, on touche, on sent, on creuse, on tombe, on a de la terre plein les mains, on a un goût de frais, une odeur de fruits, de fumier : on y est ! Souvenirs, je connais, je reconnais, c’est mon grand-père qui m’emmène : il me montre, il m’explique. Je reconnais et je découvre : pour ceux qui ont la terre grasse du Nord/Pas-de-Calais sous les ongles, il n’y a pas que dans mon coron qu’on se servait des casques ennemis, après la guerre, de la sorte… Par exemple…
Vivre un jardin pousse aux réflexions existentielles « La vie est pleine de mystères, tu n’as pas besoin de croire aux soucoupes volantes, il te suffit de considérer la levée d’un semis de cornichons pour être plongé dans des abîmes de perplexité… »(P 127).Je lis, j’absorbe. Puis, subitement, au détour d’une page, traîtreusement, une crise cardiaque attaque notre jardinier, là, seul, au milieu de son jardin ! Il tombe mais continue de nous décrire la vie, les saisons, les souvenirs, l’enfance, le corps, l’amour, les adultes, le monde… Douleur… Il continue… Je suis une lectrice impuissante, absorbée par ses propos, près de lui tenir la main. Les battements de mon cœur accélèrent, ralentissent, accélèrent de nouveau, mes yeux s’embuent, je souris, grimace. J’ai envie de lui dire : -« Ne meurs pas, raconte-moi encore, raconte-moi la vie… » Il poursuit encore un peu, patiemment puis le rythme ralentit lentement, doucement… Le jardinier arrête son hymne à la vie. Il n’y a plus qu’à observer ce corps couché là. Ce texte m’a portée du tréfonds de moi-même jusqu’à l’infini. Je suis bouleversée.

Achetez ce livre ou pas, empruntez-le ou pas mais lisez-le, nous sommes tous dans ces cent soixante-dix pages !

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