dimanche 31 octobre 2010

Nos Silences - Wahiba Khiari - Elyzad

Nos Silences
L’écriture de Wahiba Khiari est percutante et j’ai pris une grosse claque en la lisant. Percutante est le mot !

La narratrice, lectrice assidue, avide de connaissances, étudie consciencieusement à l’école. Elle est la puînée d’une famille de trois enfants. Lentement, la terreur s’infiltre dans le quotidien des familles. De procès hâtifs, illégaux en dénonciations et disparitions, les bandes armées obligent les individus à rester 24h/24h en éveil, à surveiller le moindre bruit, à juste survivre… Une nuit, la cadette de la famille est enlevée sous les yeux des siens.
Ce texte mêle la pudeur, l’impuissance, la honte, la rage, la haine, il est écrit avec « les tripes » contre l’absurde, contre le silence, contre l’oubli.

Quatrième de couverture :
Algérie, années 1990. Elles ont été des milliers à être enlevées, violées, parfois assassinées, les filles de la décennie noire. Ces très jeunes filles, à qui l’on a demandé de pardonner, se sont tues et ont ravalé leur honte. Tandis que résonne le cri de l’une d’entre elles, la narratrice raconte sa culpabilité d’avoir choisi l’exil et trouvé le bonheur. Deux voix de femmes en écho qui prennent la parole haute et forte, en mémoire de toutes les autres. L’écriture pour vaincre les silences. Un roman contre l’oubli.
Difficile de choisir des extraits sans que le propos ne perde en intensité…
Extraits:
P 46 : « Un rituel m’est resté cher tout au long de ces années : brûler les papiers dont je n’ai plus besoin, au lieu de les déchirer. Le feu m’aide à mettre de l’ordre dans mes idées.
Le regarder se raviver en se nourrissant des bribes de mon passé, me procure une chaleur intérieure, l’impression de ne garder de ma vie que le meilleur. »


P 54 : « Fini le lycée, je suis enfermée ici loin de la ville, on a peur pour moi, on me protège. J’ai pleuré, je me suis battue, j’avais la possibilité de poursuivre en interne, mais ils ont refusé. Quand il a vu mon acharnement à vouloir repartir, mon frère a pris mes livres, mes cahiers, et toutes mes affaires, il en a fait un gros tas devant la maison et il a tout brûlé. Ce jour-là, ma vie est partie en cendres. Il ne m’a pas laissé un seul mot d’écrit. Mon frère a pris sa revanche, il n’avait jamais accepté ma réussite.
A présent, je dois apprendre à écrire les yeux fermés. Juste pour ne pas sombrer dans la folie. Je dois apprendre à vivre avec des mots invisibles, muets. »


En exergue: "Ecrire c'est aussi ne pas parler. C'est se taire. C'est hurler sans bruit." (Marguerite Duras)

Inutile de dire que ce texte a laissé ses empreintes chez moi.

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